top of page

Légendes

Pastels sur bois 1

Le plumage vivement coloré, le gros bec très recourbé, l’œil vif, nous voilà face à un bel oiseau associé aux pays exotiques, ceux des Tropiques où il fait bon et chaud, où tout est chatoyant. Marina a eu envie de le dessiner ainsi car elle aime le thé vert mais elle a aussi la fâcheuse tendance (très féminine) à se répéter. Quelques-uns ont en effet la capacité d’imiter la voix humaine. Si c’est celle de l’artiste, aussi douce et posée que son pinceau, comme on aimerait qu’il prenne chair !

Lui, non seulement, il vient de loin (Australie) mais il est grand, très grand : il est le 2e plus grand oiseau du monde après les autruches. L’artiste ne s’est pas ‘attaquée’ au plus simple des oiseaux, là. Du haut de son mètre 80 et de ses 40 kg, il peut faire du 50km/h mais ne vole pas. C’est cela qui le préoccupe. Sous cet air interrogateur, il nous demande : pourquoi tous les autres autour de moi ont ce privilège et moi pas ? C’est tout de même le comble pour un oiseau, non ?

Pastels sur bois 6
IMG_2806.JPEG

Le portrait est l’un des genres les plus difficiles à réaliser. Comment saisir la candeur fragile d’un enfant, son intelligence émotionnelle encore préservée, sa spontanéité joyeuse, son enthousiasme mais encore ses premières boucles qui ne reviendront plus ?

« Sans me prendre pour une montagne, j’ai accouché d’une souris » me dit gaiement Marina face à celle-ci, si mignonne, si expressive et craquante. Et pourtant, dieu sait combien on a déjà vu de dessins de souris ! Elle a choisi de croquer la souris grise, la plus commune, la plus craintive, celle qui vit la nuit dans nos habitations. C’est pour cela qu’on l’appelle domestique (du latin domus = maison). Elle tient une place de choix dans l’imaginaire populaire et enfantin. Mais saviez-vous qu’elle joue un rôle important dans les écosystèmes ?Alors craquante certainement, mais utile aussi.

IMG_5686.jpg
IMG_5688.jpg

Qu’elle est belle, la poule ! Décoiffée ou plutôt échevelée, la femelle du coq caquète à n’en plus finir. L’oiseau de bassecour, des fermes de notre enfance qui courait à l’air libre et pondait quand bon lui semblait. Avec ses petites ailes arrondies, sa courte queue, sa jolie crête dentelée et son plumage orangé, celle-ci fait certainement partie  de la haute bassecour !

Elle s’abandonne, lascive, couchée, détendue, naturelle. Sa chevelure géométrique sur laquelle se pose son bras relevé, la courbure de son sein, celle de sa hanche face au volume de ses cuisses qui contraste avec la finesse de sa taille. Elle est magnifique. « Se répandre au lieu de se reprendre » nous glisse Marina, coquine, à l’oreille.

F24A9014-D2D2-42D0-8BC1-C19A49260169.jpe
6DD8F2DF-FC33-4CA2-A270-6DCB51E05220.jpe

Elle est forte, massive surtout. Douce aussi. Ses formes sont généreuses. Malgré son regard presque perdu et sa minuscule petite bouche rouge, elle crève le papier. Le trait qui lui donne forme est déterminé. Quel sens donner à « Vouloir apparaître », la petite phrase qui court de son épaule à sa chevelure ? Désire-t-elle être vue ? Se faire remarquer ? A nous de chercher.

 Avec la pose lancinante et l’air altier, on ne peut s’empêcher de penser à la Maja, celle de Goya, le grand maître espagnol. Quelle belle réinterprétation, quelle référence. Mais qui représente-elle ? Un modèle qui pose pour la 1re fois à l’académie dans un cours de « croquis d’après modèle vivant » ou l’une des amies de l’artiste, une femme connue dont le caractère n’a d’égal que la pudeur et qui, en tête à tête dans le studio de l’artiste se met enfin à nu ?

fullsizeoutput_f40.jpeg
IMG_0081.jpg

Celle-ci est dynamique. Elle marche, bien coiffée, le chignon relevé. Elle est maquillée aussi. Mais tout en se retournant légèrement vers nous, on se demande où va-t-elle donc de ce pas, nue comme un vers ? Le trait bleu ne fait qu’accentuer, souligner le geste. Il donne du style au style.

Elise est la nièce de l’artiste. « Il y eut de nombreuses séances de pose, joyeuses et bienvenues qui ont toujours commencé par des goûters gourmands » nous raconte Marina. Souvenirs familiaux affectifs inattendus. Et merveilleux.

Comme quoi, modeler mène à tout.

IMG_1383.jpeg
IMG_1105.jpeg

Ah les mamans. Celle de Marina était jolie, douce, gracieuse. Je parle en connaissance de cause. « Elle était dans son lit », nous confie sa fille « et moi, j’amenais de l’argile dans sa chambre à coucher ! Ce furent de longs moments de douceur et de confiance. » Ces moments d’exception où le temps s’arrête et le bonheur est palpable.

Un pays chaotique, qui ne ressemble à aucun autre. Des hommes et des femmes aux cerveaux ‘brainwashés’ avec lesquels il était particulièrement difficile d’avoir une vraie discussion. Des ruines gréco-romaines parmi les mieux conservées de l’Africa romana. Des temples aux souks en passant par la mer turquoise et l’un des plus beaux déserts du monde, d’une variété à couper le souffle. Les images s’entrechoquent, la beauté était là partout à portée de main mais la surveillance aussi…  

IMG_0561.JPEG
7E05AD36-DFE7-4379-8869-72BF06015A98.jpe

Un pays devenu lui aussi impraticable ces dernières années, trop dangereux pour les touristes comme nous, où il règne plus de désordre que d’ordre, des notions qui s'inversent dans l’atelier de Marina qui range en peignant !

« Mais c’est involontaire » ajoute-t-elle comme pour s’excuser.

En attendant, elle a saisi avec talent l’essence de cet ailleurs, avant qu’il ne saigne et souffre… 

par Virginie de Borchgrave,

Avril 2021

bottom of page